Copenhague, tout ça pour ça… (27 janvier 2010)



La Conférence de Copenhague s’est achevée dans la confusion sur un texte vague de moins de trois pages, non contraignant, rappelant tout de même l’objectif de limiter à 2°C le réchauffement climatique mais on n’y trouve aucune allusion à la réduction d’un facteur 2, par référence à 1990, des rejets de gaz à effet de serre d’ici 2050 ; ce texte est assorti de deux pages d’annexes laissées en blanc ! Bref un triste brouillon contesté par de nombreuses délégations et laissé non signé par des chefs d’état pressés, qu’ils étaient, de regagner leurs pénates.

Une année de battage médiatique, de tentatives de culpabilisation du public des pays dits du Nord, de manipulation de l’opinion n’aura donc pas suffi pour amener les milliers de délégués de 192 Etats et les 110 chefs d’Etat qui avaient fait le voyage de Copenhague à accoucher d’un accord.

Comment aurait-il pu en être autrement quand, au terme de 3 à 5 ans, la plupart des responsables politiques sont jugés sur les résultats, obtenus le plus souvent au plan local ?

Comment les pays en déclin comme l’Europe ou le Japon ont-ils pu, au fil des mois, s’imaginer qu’ils pourraient amener les pays émergents à s’engager à ne pas les suivre sur la voie du développement ?

Comment avaient-ils pu imaginer que la Chine accepterait des objectifs sévères dont le respect serait sous le contrôle de fonctionnaires étrangers ?

Comment a-t-on pu faire croire que en forçant le président américain à faire le voyage de Copenhague, celui-ci prendrait des engagements allant à l’encontre de l’opinion de ses concitoyens et de leurs représentants, ceux-ci étant, semble-t-il, beaucoup moins mûrs que ne le sont les européens – et peut-être plus égoïstes?

La Conférence a donc vu s’affronter deux mondes : l’un – essentiellement l’Europe – idéaliste et naïf, prêt à un effort de solidarité et à accepter certains sacrifices douloureux et engageants et l’autre, très hétérogène, rassemblant des pays n’ayant de commun que le chacun pour soi, dont le développement est encore faible – y compris la Chine si on veut bien considérer les chiffres par habitant et non les chiffres globaux – ainsi que les Etats-Unis qui fondent tous leurs espoirs sur la recherche et le progrès technologique et qui, aujourd’hui encore, ne croient guère à la nécessité de lutter contre le réchauffement climatique.

Faut-il, dans ces conditions, regretter qu’il n’y ait pas eu d’accord à Copenhague ? Sans doute pas car il y a fort à penser que l’Europe aurait été perdante. Les perdants de Copenhague sont sans doute les pays du Sud, et les plus pauvres d’entre eux, qui n’ont eu de cesse, pendant les deux semaines de la conférence, de faire monter les enchères. Quant aux scientifiques du GIEC et aux représentants des ONG, ils ont quitté Copenhague profondément traumatisés



Le Protocole de Kyoto sera probablement sans suite, là encore il ne faut sans doute pas le regretter : ses résultats sont assez maigres, il ne concernait ni la Chine ni les États-Unis et le système de marché des droits à polluer qu’il comporte n’est ni moral ni efficace, sans oublier que l’énergie nucléaire y était mal traitée.

Pour qu’il n’y ait pas de regret, encore faudrait-il que le monde ne perde pas à nouveau dix ans dans la vaine quête d’un accord à 192 quand il convient que seuls une vingtaine de pays se fixent des objectifs sérieux, progressifs, justes (émissions par habitant et non par pays ou par unité de PIB), équitablement répartis et bien sûr engageants… est-ce la quadrature du cercle ?... Non, pour autant qu’il y ait volonté d’aboutir à un accord. Il reste à espérer que la Chine comme les Etats-Unis évolueront rapidement au cours des toutes prochaines années et feront preuve de cette volonté et de beaucoup de pragmatisme.

Les pessimistes retiendront que la Conférence de Copenhague ne fut guère qu’un évènement médiatique. Les optimistes, auxquels nous appartenons, retiendront qu’il y a désormais un certain consensus pour lutter contre le réchauffement climatique, que celui-ci ait ou non une origine humaine. Il convient donc que les opinions de la vingtaine de pays signalés précédemment agissent pour amener leurs gouvernants à accepter un accord comportant de multiples volets :

sans pour autant contrarier la reprise de la croissance.

Nul doute nous que nous serons amenés à en reparler, assez vite.



Bernard Lenail